Emmaüs Défi : l’insertion sociale et durable
Avec les événements inédits des derniers mois, de nombreuses actions solidaires se sont mises en place. Derrière ces actions solidaires, des individus, des femmes et hommes, qui n’ont cessé d’innover pour continuer d’apporter leur aide à celles et ceux isolés ou en situation de détresse.
Aujourd’hui, nous souhaitons vous présenter et partager le fabuleux travail, réalisé avec conviction, de l’association Emmaüs Défi. Cette dernière œuvre depuis mars 2007 et agit comme laboratoire d’innovations sociales pour lutter contre toute forme d’exclusion.
Nous vous expliquerons aussi pourquoi l’association nous tient à cœur et quel est son lien avec Lamazuna .
Iva et Philippine ont accepté de répondre à nos questions. Découvrez-en plus sur Emmaüs Défi !
COMMENÇONS PAR UNE QUESTION HABITUELLE
Qui êtes-vous et quelles sont vos missions au sein de l’association ?
Iva : je suis Responsable Opérationnelle chez Emmaüs Défi, en charge de toutes les activités dans lesquelles des salariés en insertion travaillent sur le chantier : la logistique, l’activité de tri des dons, les ventes et les ateliers de créations – les ReCréateurs.
Philippine : Je suis chargée de mission développement et communication chez Emmaüs Défi depuis deux ans et demi maintenant. Concrètement, je réponds aux besoins de communication, d’organisation d’événements, ou de gestion de partenariats variés, à la fois au niveau de la structure globale (Emmaüs Défi) et au niveau des projets comme les ReCréateurs, La Banque Solidaire de l’Équipement, L’Équipage, etc.
Je suis également chargée du développement du réseau Amistock, notre réseau de points de dépôt pour les dons à Paris, parmi lesquels nous sommes ravis de compter la boutique Lamazuna !
POUVEZ-VOUS NOUS RACONTER COMMENT EST NÉE L’ASSOCIATION ?
Philippine : Durant l’hiver 2007, a eu lieu un événement qu’on appelle aujourd’hui la « Crise du Canal Saint-Martin » : des dizaines de sans-abri plantent leurs tentes sur les bords du canal pour interpeller les pouvoirs publics sur l’inefficacité des programmes d’insertion, qui étaient trop focalisés sur l’hébergement d’urgence et non sur l’insertion long terme. Emmaüs France, avec le soutien des communautés Emmaüs d’Île-de-France, initie alors la création d’Emmaüs Défi, qui aura pour mission de créer des solutions innovantes pour lutter contre la grande exclusion.
C’était un vrai défi, d’où le nom de l’association ! L’association repose sur un modèle vertueux décrit tel quel : « le réemploi d’objets au service de l’emploi ».
Pouvez-vous nous décrire comment fonctionne ce cercle vertueux ? Quels en sont les acteurs ? Quels sont leurs missions et rôles ?
Iva : Les acteurs de ce cercle vertueux sont nombreux ! Nous sommes d’abord en contact avec des acteurs sociaux qui nous orientent vers des personnes en situation de précarité, principalement à la rue ou en logement précaire, qui entameront chez nous un parcours d’insertion qui dure généralement quelques années.
Au sein de notre chantier d’insertion, 150 « salariés en parcours d’insertion » participent ainsi aux activités de collecte, tri, et vente d’objets. Sans oublier toute l’équipe des bénévoles et des « salariés permanents » (dont nous faisons toutes les deux partie) qui sont chargés de l’encadrement, de l’accompagnement des salariés, et de tout ce qui est nécessaire pour faire tourner l’association. Le travail de revalorisation des objets est donc le levier principal de l’insertion des personnes : c’est le réemploi au service de l’emploi !
Philippine : Parmi les acteurs principaux de ce cercle vertueux, il faut aussi citer toutes les personnes qui nous donnent des objets et des meubles, et ceux qui rendent cela possible, notamment les Amistocks, qui recueillent les dons pour nous tels que la boutique Lamazuna.
Enfin, n’oublions pas les clients qui viennent acheter en magasin et contribuent ainsi à la pérennité économique de notre action, de même que les entreprises qui passent commande auprès de nos ateliers de couture ou de menuiserie.
Emmaüs Défi intervient pour aider les grands exclus à trouver, grâce au travail, une place digne dans la société de façon durable.
Pouvez-vous nous parler rapidement des défis quotidiens que relève l’association pour atteindre son objectif ?
Philippine : Nos défis quotidiens tiennent principalement à 2 éléments : les difficultés personnelles des personnes que nous accompagnons, et le cadre social et législatif « excluant » qui nous entoure.
Emmaüs Défi s’est donné comme mission, depuis le début, de tendre la main aux personnes qui sont dans les situations les plus précaires possibles, et de leur permettre de retrouver leur place dans la société. La grande majorité des salariés qui nous rejoignent ont vécu à la rue longtemps, plusieurs années. Les défis sont donc nombreux pour les accompagner sur le chemin de l’insertion : problèmes de santé invalidants, traumatismes, addictions, perte du lien social, formations limitées, langue…
Nous le constatons tous les jours : la société dans laquelle nous vivons ne réserve pas une place digne pour ces personnes, pour de nombreuses raisons. Notre défi est donc d’embarquer avec nous les entreprises, les pouvoirs publics, les individus, pour qu’ils partagent cette idée que tout le monde a droit à une place dans la société. Cela passe par exemple par l’embauche de nos salariés chez des entreprises partenaires, des changements de la législation, ou de la sensibilisation auprès du grand public.
Les bénévoles sont aussi au cœur de l’association.
POUR LES INTÉRESSÉ.ÉE.S, QUELS SONT LES PRÉREQUIS POUR DEVENIR BÉNÉVOLE AU SEIN DE EMMAÜS DÉFI ?
Iva : Le seul prérequis est d’adhérer au projet social et à l’état d’esprit d’Emmaüs Défi, et de comprendre que les bénévoles font partie de la structure au même titre que les salariés en parcours d’insertion ou les permanents : ils ne sont ni moins importants, ni plus.
Ensuite, pour être plus concrets, nous recherchons parfois des bénévoles pour renforcer nos équipes sur certains gros événements, comme nos ventes spéciales. Nous sommes également à la recherche de bénévoles ayant le permis pour soutenir notre équipe logistique, qui effectue les collectes des dons à domicile.
Philippine : Je rajouterais que nous recherchons aussi des bénévoles Amistocks, c’est-à-dire des lieux, commerçants, ou personnes, pour rejoindre, comme Lamazuna, notre réseau de points de dépôt qui récupèrent les objets donnés par les Parisiens, et qui sont ensuite collectés par notre équipe logistique.
Les chiffres reportés par votre association sont alarmants. 28 800 personnes à Paris n’ont pas de domicile fixe, 4 000 personnes dorment dans la rue à Paris.
SELON VOUS, COMMENT CHACUN D’ENTRE NOUS PEUT AIDER À FAIRE BAISSER CES CHIFFRES ?
Philippine : Vous pouvez vous tourner vers les structures Emmaüs comme la nôtre, il y en a sur tous les territoires ! Acheter dans les magasins Emmaüs, leur donner des objets ou meubles en bon état et avec de la valeur, c’est participer à la lutte contre l’exclusion et ce n’est vraiment pas difficile !
Les structures d’insertion qui reposent, comme nous, sur la revalorisation d’objets donnés, sont menacées par l’essor des plateformes de revente entre particuliers : selon moi, réadopter le réflexe de donner aux associations plutôt que de chercher à gagner quelques euros en revendant, c’est déjà une belle manière d’aider.
Notre atelier boutique Lamazuna à Paris récolte des dons pour votre association. Mais notre partenariat ne s’arrête pas là. Emmaüs Défi a fabriqué des pochettes en tissu upcyclées pour Lamazuna.
POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DE L’IMPORTANCE DE CE TYPE DE PARTENARIAT LAMAZUNA X EMMAÜS DÉFI ?
Iva : C’est très agréable de travailler avec un partenaire comme Lamazuna, avec qui on partage tant de valeurs ! Depuis des années maintenant, la boutique Lamazuna recueille bénévolement les dons des habitants du 10ème pour Emmaüs Défi : en cela, les équipes participent à notre activité opérationnelle mais sont aussi un ambassadeur local magnifique pour notre association.
C’est aussi le cas des pochettes en tissu upcyclées commandés à l’atelier couture d’Emmaüs Défi : en faisant confiance à nos couturières en insertion, Lamazuna prouve que les personnes que nous accompagnons fournissent un travail de valeur, et devient ainsi un ambassadeur de notre cause auprès des clients et même des autres entreprises.
D’APRÈS VOUS, POURQUOI ÉTAIT-IL IMPORTANT QUE NOS DEUX ENTITÉS COLLABORENT ENSEMBLE ?
Iva : Lamazuna et Emmaüs Défi partagent une vision commune de l’économie et de la consommation, respectueuse des Hommes et de l’environnement dans la durée. C’était donc naturel de collaborer, il y avait une envie mutuelle !
Ce type de collaboration est aussi très importante car elle montre qu’une autre économie est possible à grande échelle et que les initiatives écologiques ou solidaires ne sont pas isolées : peut-être que demain, 100 % des fournisseurs ou partenaires d’Emmaüs Défi et de Lamazuna seront des entreprises ou associations qui partageront cette même vision. C’est du moins ce que j’espère, et je pense que des collaborations comme la nôtre montrent que c’est possible !
Le durable est une valeur commune à nos deux entités. Emmaüs Défi, via ses missions, met tout en œuvre pour créer de l’insertion durable pour ses salariés en parcours d’insertion. Chez Lamazuna, nous prônons des produits durables pour la planète et ses usagers. À partir de cette valeur commune de durabilité, Iva et Philippine…
QUEL EST LE PRODUIT DURABLE LAMAZUNA QUI VOUS PARLE LE PLUS ?
Philippine : Pour ma part, ce sont les lingettes démaquillantes lavables, pour plusieurs raisons. C’est un geste simple mais avec un impact énorme : j’ai adopté cette solution depuis 3 ans environ, et j’ai ainsi économisé plus d’un millier de cotons qui auraient été jetés après avoir servi quelques secondes !
D’autre part, c’est aussi une solution économique puisqu’on finit par économiser de l’argent : c’est un argument qui me parle également car l’engagement écologique ne peut pas se faire aux dépens du porte-monnaie, si l’on veut qu’il soit accessible à tous. C’est aussi valable pour les achats dans les magasins Emmaüs d’ailleurs : cela fait du bien à l’environnement et au porte-monnaie en même temps !
Iva : Même réponse que Philippine : les lingettes démaquillantes. C’est ce qui, au quotidien, pour moi, marque le plus le changement d’approche vers une consommation responsable ; c’est pratique, facile, économique au bout du compte et surtout écologique. Et on se dit, mais, pourquoi tout le monde n’y passe pas ?
Enfin, nous vous proposons un saut dans le futur !
DANS 10 ANS, QUELLES SERONT LES MISSIONS PRINCIPALES D’EMMAÜS DÉFI ?
Philippine : J’espère qu’Emmaüs Défi n’existera plus, car le nombre de personnes en situation de précarité sera tombé à zéro ! Malheureusement, ce n’est pas très réaliste… Je fais confiance à l’esprit d’innovation d’Emmaüs Défi pour trouver encore des solutions nouvelles pour lutter contre l’exclusion, même dans 10 ans.
Aujourd’hui, nos activités englobent la logistique, la vente, la menuiserie, la couture, la restauration… Peut-être que dans 10 ans, ce sera la musique, la coiffure, la garde d’enfants, ou que sais-je !
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